Saint Nicolas vire (enfin!) féministe...
Un beau matin, comme Al & Xa se sentaient la plume vengeresse et le verbe aiguisé, ils décidèrent d’aller interviewer des marchands de jouets. Mwahahahaha. Rires sardoniques. On se voyait déjà photographier d’horribles rayons roses et des mochetés bleues, des piles de poupées d’un côté, des monceaux d’armes de l’autre, des dînettes à deux rayons des établis… Et, tout joyeux, nous étions bien décidés à donner notre propre coup de canif dans cette présentation sexiste qui inscrit les stéréotypes de genre dans la tête de nos petits avant même qu’ils sachent écrire et compter.
Puis, nous avons discuté avec Bruno chez Broze et avec Vicky et Damien à la Grande Récré et nous avons dû déchanter : non, nous n’allions pouvoir pourfendre personne de la journée (ou en tout cas pas là).
Du côté de chez Broze, Bruno nous assène : « l’enseigne lutte contre les clichés du style le chariot de ménage pour les petites filles, l’atelier menuiserie pour les petits garçons etc. Broze a cassé ça en concentrant tout sur un seul rayon et en l’appelant « comme les grands ».
Au début, les clients réclamaient fort les différences, les stéréotypes, les rayons roses et bleus, mais c’est l’esprit Broze qui s’y oppose ! » Là, nous avons avalé bruyamment notre salive. Quoi ? Une grande enseigne a décidé de se détacher des stéréotypes de genre ? Mais alors, nous sommes vraiment en train de faire bouger les choses ? Le monde évolue ? L’espoir est permis ? Bref, des pensées joyeuses ont commencé à nous trottiner dans la tête.
Mais, en gens avisés et prudents, nous restions sur nos gardes. Alors, nous avons demandé à Bruno de nous expliquer les codes couleurs. Bruno nous répond que la couleur des garçons est en général perçue par les clients comme une couleur neutre. La seule couleur associée à un genre étant le rose pour les filles, couleur que les fabricants de jouets continuent d’utiliser pour satisfaire leur clientèle. Et donc, chez Broze, ils évoluent, réfléchissent, visiblement lisent de la sociologie et ils essaient de casser les codes…
OMG. Alors, un peu méfiant, nous sommes allés à la Grande Récré. Là, nous avons d’abord discuté avec Vicky, et elle nous a un peu rassurés : non, les clichés n’étaient pas morts : « Les rayons sont organisés en fonction du sexe : on a d’abord les jouets premier âge, puis les jouets pour les filles et pour les garçons de 3 à 12 ans et enfin tout ce qui est bricolage et jeux de société qui sont organisés de façon mixte. Dans chaque rayon, on sépare les types de jeux, éventuellement on sépare entre filles et garçons. La séparation filles garçons vient d’abord d’impératifs logistiques pour le personnel et aussi pour la facilité des clients habitués. C’est la centrale qui ordonne l’organisation. »
Aaaaaaah, voilà ce qu’on voulait entendre ! Du sexisme genré bien gras. Du rose et du bleu, des Barbies sans tétons, des aspirateurs miniatures roses ! On était tout rassurés. Mais Vicky s’empressa d’assurer que de plus en plus de glissements entre rayons filles et garçons étaient opérés et que la marque La Grande Récré proposait exclusivement des produits mixtes !
Et Damien est venu ajouter : « Le marché du jouet se transforme, notamment pour les clivages de genre. La Grande Récré suit le mouvement. Le rayonnage filles/garçons est beaucoup moins visible aujourd’hui qu’hier et très vite il va encore disparaître davantage. »
So what? Et bien, écoute… Tu entends? Quelque chose se passe. Ouvre un des nombreux magazines de jouets que tu as dû recevoir pour la Saint-Nicolas. Regarde. Les pages roses sont réduites au minimum. Parfois, il n'y a même plus de pages bleues. Alors, c'est pas encore gagné gagné. Il n'y a toujours pas de modèle de poupée avec des petites photos de garçon et qui ne serait pas majoritairement rose. Par contre, de petits établis à outils avec des photos de filles, il y en a. Des petite cuisinière et des sets de ménage avec des photos de garçons, il y en a. Et ça, ça fait du bien ! Oh oui, c'est bon ça! On continue?
Al & Xa, heureux.
Viens nous lire au quotidien!